mercredi 15 janvier 2020

Les mariés de l'an V

On ne dira jamais assez tout ce que le généalogiste doit aux indexations réalisées le plus souvent par des bénévoles d'associations. Ainsi, Mariages 33 (avec un lien sur Geneanet) m'a-t-il permis de retrouver un ancêtre que je n'aurais jamais débusqué sans cette aide. Le président de l'association girondine rencontré lors d'une précedente édition du Salon de la Généalogie m'avait bien fait une démonstration en tentant une recherche sur mon nom mais à l'époque, elle n'avait rien donné.

Et pour cause, je n'avais pas pensé aux orthographes fantaisistes de celui-ci et encore moins imaginé que les Archives de Bordeaux Métropole pouvaient couvrir une période de trois siècles commençant sous la Révolution, exactement de 1792 à 1916 ! Récemment, la mise en ligne des décès de 1970 à 2019 par l'Insee avec là encore un lien sur Geneanet, m'a amené à relancer une recherche sur mon patronyme.

Et là, ô surprise, je tombe sur un Simon Depherre marié à Bordeaux le 1er Ventôse de l'an V, soit le 19 février 1797 en plein Directoire ! Un vrai bonheur à lire cet acte, clair, détaillé, voilà qui me change des pattes de mouche des grimoires de la Soule à la même époque ! Ma première réaction va pourtant être un petit coup au cœur comme en éprouve souvent le généalogiste amateur.

Je m'explique. J'ai mis quatre ans à relier les Eppherre dont je descends aux Eppherre de Barcus, berceau de la maison du même nom et de la famille. L'une de ses branches remonte à un François Epherre dit Iriart (sosa 144) qui a fait souche à Alos, l'autre à un Simon Eppherre dit Recalt (sosa 32) qui lui, a "donné" les Eppherre de Sunharette puis d'Aussurucq. L'un est l'oncle paternel de l'autre, on parle donc de deux générations distinctes.

Que vient faire là-dedans mon Bordelais qui lui aussi se prénommait Simon ? Passé cette seconde d'appréhension sur la validité de mes hypothèses (étayées par des sources très sérieuses, je rassure mon lecteur !), son acte de mariage m'apporte toutes les réponses aux questions que je me posais à son sujet. Fils d'Arnaud Epherre dit Uthurralt, de Barcus et de Marguerite Uthurralt, de Restoue, c'est donc un neveu de François et un cousin germain de l'autre Simon.

En ce premier jour de Ventôse an V, Simon épouse à 34 ans, une dénommée Marie Burguburu d'un an son aînée, elle-même originaire de Tardets en Haute-Soule. Il "loue ses services" ce qui peut se traduire par homme à tout faire, journalier, tandis qu'elle est caffetière (sic) auprès de ses parents dans un café sis au 7 rue du 10-août à Bordeaux-Nord. 

En dehors de son acte de décès survenu le 5 décembre 1815 alors qu'il est cafetier au 16 rue Dauphine à Bordeaux (section 1) à l'âge de 53 ans, je n'ai trouvé ni actes de naissance d'enfants ni acte de décès de son épouse qui lui a survécu. A-t-elle encore déménagé ? Est-elle rentrée au pays ? Pour le moment, aucune piste...

Quant à l'arrivée de ce cadet basque (cinquième sur une fratrie de six) à Bordeaux, je pencherais pour une enrôlement comme soldat au sein du 4e Bataillon des Chasseurs basques, déjà évoqué, qui  joua un rôle de maintien de l'ordre dans la ville sous la Convention.

Une dernière chose, Simon était sans doute le filleul d'un de ses deux oncles paternels prénommés comme lui, dont un était Docteur en théologie et vicaire de Chéraute tandis que l'autre était curé d'Orthez, les deux réputés curés réfractaires, et dont on perd la trace en Espagne en 1792. Le premier réapparaitra néanmoins en 1803 au moment du rétablissement du culte, et deviendra le premier curé concordaire à Chéraute puis à Ordiarp. 

C'est un euphémisme que de dire que la Révolution française a bouleversé l'Histoire mais j'aime quand la petite histoire de mes ancêtres rencontre ainsi la grande...

Illustration : "L'accordée du village" de Jean-Baptiste Greuze (1761). Musée du Louvre.
SourcesAD64, Archives de Bordeaux-Métropole (acte de mariage), Mariages33Geneanet.
Sur les curés réfractaires : Gallica.bnf

4 commentaires:

  1. Une belle découverte que cet acte de l'an V ! Bravo !

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    1. Merci Sébastien. En temps normal, je n'aime pas forcément expliquer de quelle manière je suis tombée sur un acte mais là, il me semblait important de citer d'autres sources et mettre en avant le travail d'indexation des associations. Ce n'est pas toi qui me démentira, n'est-ce-pas ;=) ?

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  2. Je lance périodiquement des recherches dans certains fonds indexés sur Paris, et parfois je fais bonne pioche. Merci à tous les indexeurs, et bravo pour cet article

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    1. Merci Brigitte, je "travaille" beaucoup sur les indexations Gen&O dans le 64, c'est fou le temps qu'on y gagne !

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