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vendredi 7 mai 2021

Gratian Ducque (1600 - ap. 1682), mon ancêtre né sous Henri IV

Gratian Ducque (ou De Ducque) n'est pas le plus ancien ancêtre de mon arbre ni le seul à avoir vécu au 17e siècle mais pour l'époque, il est celui qui aura laissé le plus de traces de son passage sur cette terre ! Je sais par exemple qu'il est né au tournant du siècle car dans son testament du 25 janvier 1670 retenu par Maître Pierre Dubarbier, notaire à Barcus, il précise d'emblée qu'il est âgé de soixante-dix ans ou environ. 

Pour l'anecdote, quand j'annonce à mon père que j'ai trouvé un ancêtre direct né en 1600, il me réplique aussitôt "Sous Henri IV !" Ah oui, je n'y avais pas pensé alors que pour ma génération, 1610 suscite aussitôt dans notre cerveau reptilien l'association avec "l'assassinat d'Henri IV par Ravaillac"... 

Ce bon roi Henri qui fut d'abord Henri III roi de Navarre avant de s'asseoir sur le trône de France, a vu le jour au château de Pau distant d'à peine une dizaine de lieues de Barcus. Béarnais, c'est un proche voisin de la Soule, et je soupçonne fortement le nom de Ducque (parfois écrit Duque) de sonner plus gascon que basque...

Notre petit Gratian, futur cultivateur propriétaire, naît dans la maison de Ducque dont il est l'héritier, sise dans le quartier Gastellondo (ou Gaztelondo) de Barcus, au foyer de Pees Ducque et Marie Sartillon. Celle-ci semble descendre d'une grande famille, les de Sartillon, issus d'un cadet de la maison d'Oilher de Barcus mais je n'ai pas poussé mes investigations très loin dans cette branche.   

En 1600, le bourg de Barcus est alors en pleine expansion. Le journal de Pierre Casalivetery, notaire à Mauléon, dénombre 210 feux pour les années 1540-1549 contre 26 un siècle plus tôt. Barcus qui comptera 2 299 habitants au premier recensement de 1793 connaîtra par la suite une lente érosion de sa population  pour atteindre le chiffre de 636 à celui de 2018. 

De la fratrie de Gratian, je ne connais que ses sœurs, Catherine Ducque mariée à Dominique Etchebarne, Marie mariée à Bernard Aramburu, toutes deux maîtresses adventices des maisons du même nom à Barcus, et une autre Marie mariée à Bernard Berho, maître de la maison de Berho dans le même quartier de Gastellondo ... mes ancêtres. Un bel exemple d'implexe dans mon arbre puisqu'en effet, je descends en ligne directe à la fois du frère et de la sœur !

A la génération suivante, Gratian qui a épousé Marguerite Horment de Tardets, a quatre enfants : Dominique, l'aîné - mon aïeul - Marie, maîtresse adventice de la maison Urruty de Sauguis après son mariage avec Pierre Sieur d'Urruty, une autre Marie dite Nanoue mariée en 1657 avec Pierre Sieur d'Agaras, tous deux cultivateurs à Barcus, et Catherine, la puînée, probablement restée célibataire.

L'arrière-arrière-petite-fille de Gratian Marianne Ducque (ca 1732-1794) épousera en 1754 mon aïeul Dominique Eppherre (ca 1726-1816) dont la mère Catherine était elle-même son arrière-petite nièce. L'endogamie se pratiquait largement à cette époque comme le montre cette carte de Barcus de 1887 où les maisons de mes ancêtres sont indiquées.    
Gratian qui, prudent, a fait son testament dès 1670 vivra encore de nombreuses années. Régulièrement mentionné dans les minutes notariales de la période dans de nombreux contrats d'achats de terre, de mariage de sa fille, etc., où il signe son nom, il y est encore présent en avril 1682. Sa mort se situe entre cette date et cinq ans plus tard. En mai 1687 en effet, quand son fils Dominique héritier de Ducque se présente devant Maître Arnaud Dubarbier pour acheter des terres, l'acte précise que son père est décédé.

Signatude de Gratian De Ducque en 1664

Mon vénérable aïeul aura donc vécu plus de quatre vingt-deux-ans. Né sous le règne du Vert Galant et mort sous celui du Roi Soleil...

Illustrations
Gravure du château de Pau par Thomas Allom (1804-1872). Partie du Fonds Ancely de la Bibliothèque municipale de Toulouse (Rosalis).  Sources : Wikimedia Commons
Extrait du Recueil de linguistique et de toponymie des Pyrénées - Tome 2 Basses-Pyrénées (1887) de Julien Sacaze en ligne sur Gallica-BNF
Sources : AD64 (minutes notariales)
Population de Barcus : Wikipedia
Sur la famille de Sartillon : Arnaud d'Oilhenart et sa famille par Jean de Jaurgain (1885) dans Geneanet

samedi 15 février 2020

Le laboureur et le châtelain

Il fait plutôt friquet ce matin du 3 mars 1769 tandis que je traverse le parc du château de Trois-Villes en Haute-Soule. Le Château d'Eliçabia, c'est son nom, est une belle maison noble qui domine le Saison. Il se murmure que ses plans auraient été conçus par le grand architecte Mansart lui-même, et qu'au siècle dernier, il retrouva un peu de son lustre grâce à Jean-Arnaud du Pereyre, Capitaine des Mousquetaires du Roy, qui le fit transformer en un édifice "Grand Siècle".

Anobli en 1643 par la grâce d'Anne d'Autriche, le vaillant mousquetaire - il s'était distingué lors du siège de La Rochelle - devint comte de Trois-Villes (ou de Tréville). Après sa mort en 1672, et celle de son fils unique Joseph-Henry sans descendance, c'est à son neveu le Chevalier Armand-Jean, marquis de Monein et comte de Trois-Villes que revint le château. Hélas, je n'aurai pas la chance de le croiser.

En effet, si je suis là en catimini aujourd'hui, c'est pour emboîter le pas à mon ancêtre Dominique Eppherre qui s'apprête à signer un important contrat pour lequel il a fait le déplacement depuis Barcus. Messire Jean Pierre, abbé de Sarry, est "fondé de procuration" pour le comte comme l'annonce d'emblée M° Darhan, notaire à Tardets.

La transaction porte sur un bail à ferme pour neuf ans et neuf récoltes consécutives qui prendra effet au prochain jour des Rameaux et aura pour terme le même jour de 1778. Tandis que je propose mon cruchon aux participants (c'est tout ce que j'ai trouvé pour pouvoir observer la scène à loisir), j'essaie de comprendre les tenants de ce contrat mais ce n'est pas simple !

Il y est question de fruits décimaux que mon aïeul percevra mais aussi de quatre conques de milloq, de dix conques de froment et d'un agneau de choix qu'il devra "bailler" chaque année au titre de la dîme à l'église de Laguinge appartenant au Seigneur de Trois-Villes, en plus d'un loyer de 428 livres par an*. Ce contrat me semble bien léonin mais a l'air de satisfaire Dominique qui appose sa plus belle signature au bas du parchemin. Il est vrai que ce n'est pas rien pour un laboureur au 18e siècle de prendre à ferme les terres d'un seigneur !
En plus du curé et du notaire, les autres signataires sont Jean d'Espeldoy de Tardets, sergent royal, et Henry de Pourtau, négociant à Montory, témoins. L'oncle paternel de Dominique, Jean Saru, qui était concierge au château de Trois-Villes à cette époque n'est pas présent. J'aurais aimé demander à mon ancêtre si c'est par son intermédiaire qu'il avait eu ses entrées auprès du châtelain mais il est temps pour moi de me faire oublier...  

Qui sait, en repartant, peut-être vais-je croiser dans le beau jardin à la française le nommé Pierre Bouvié, originaire de Chateaubourg en Bretaigne (sic), jardinier exilé en cette terre souletine ? 
*environ 4826 euros

Illustration : Le château de Trois-Villes par le Dr Delanghe (Bilketa)
Sources : AD64 (état civil et minutes notariales) et sur le château de Trois-Villes : Baskulture
Bibliographie : "Ancêtres paysans" de Marie-Odile Mergnac (Ed. Archives & Culture)
Ce billet a été réalisé dans le cadre du RDV Ancestral, un projet d'écriture mêlant littérature et généalogie. La règle du jeu est la suivante: je me transporte dans une époque et je rencontre un aïeul. Pour retrouver mes précédents billets sur ce thème, suivre le libellé #RDVAncestral. 


mercredi 15 janvier 2020

Les mariés de l'an V

On ne dira jamais assez tout ce que le généalogiste doit aux indexations réalisées le plus souvent par des bénévoles d'associations. Ainsi, Mariages 33 (avec un lien sur Geneanet) m'a-t-il permis de retrouver un ancêtre que je n'aurais jamais débusqué sans cette aide. Le président de l'association girondine rencontré lors d'une précedente édition du Salon de la Généalogie m'avait bien fait une démonstration en tentant une recherche sur mon nom mais à l'époque, elle n'avait rien donné.

Et pour cause, je n'avais pas pensé aux orthographes fantaisistes de celui-ci et encore moins imaginé que les Archives de Bordeaux Métropole pouvaient couvrir une période de trois siècles commençant sous la Révolution, exactement de 1792 à 1916 ! Récemment, la mise en ligne des décès de 1970 à 2019 par l'Insee avec là encore un lien sur Geneanet, m'a amené à relancer une recherche sur mon patronyme.

Et là, ô surprise, je tombe sur un Simon Depherre marié à Bordeaux le 1er Ventôse de l'an V, soit le 19 février 1797 en plein Directoire ! Un vrai bonheur à lire cet acte, clair, détaillé, voilà qui me change des pattes de mouche des grimoires de la Soule à la même époque ! Ma première réaction va pourtant être un petit coup au cœur comme en éprouve souvent le généalogiste amateur.

Je m'explique. J'ai mis quatre ans à relier les Eppherre dont je descends aux Eppherre de Barcus, berceau de la maison du même nom et de la famille. L'une de ses branches remonte à un François Epherre dit Iriart (sosa 144) qui a fait souche à Alos, l'autre à un Simon Eppherre dit Recalt (sosa 32) qui lui, a "donné" les Eppherre de Sunharette puis d'Aussurucq. L'un est l'oncle paternel de l'autre, on parle donc de deux générations distinctes.

Que vient faire là-dedans mon Bordelais qui lui aussi se prénommait Simon ? Passé cette seconde d'appréhension sur la validité de mes hypothèses (étayées par des sources très sérieuses, je rassure mon lecteur !), son acte de mariage m'apporte toutes les réponses aux questions que je me posais à son sujet. Fils d'Arnaud Epherre dit Uthurralt, de Barcus et de Marguerite Uthurralt, de Restoue, c'est donc un neveu de François et un cousin germain de l'autre Simon.

En ce premier jour de Ventôse an V, Simon épouse à 34 ans, une dénommée Marie Burguburu d'un an son aînée, elle-même originaire de Tardets en Haute-Soule. Il "loue ses services" ce qui peut se traduire par homme à tout faire, journalier, tandis qu'elle est caffetière (sic) auprès de ses parents dans un café sis au 7 rue du 10-août à Bordeaux-Nord. 

En dehors de son acte de décès survenu le 5 décembre 1815 alors qu'il est cafetier au 16 rue Dauphine à Bordeaux (section 1) à l'âge de 53 ans, je n'ai trouvé ni actes de naissance d'enfants ni acte de décès de son épouse qui lui a survécu. A-t-elle encore déménagé ? Est-elle rentrée au pays ? Pour le moment, aucune piste...

Quant à l'arrivée de ce cadet basque (cinquième sur une fratrie de six) à Bordeaux, je pencherais pour une enrôlement comme soldat au sein du 4e Bataillon des Chasseurs basques, déjà évoqué, qui  joua un rôle de maintien de l'ordre dans la ville sous la Convention.

Une dernière chose, Simon était sans doute le filleul d'un de ses deux oncles paternels prénommés comme lui, dont un était Docteur en théologie et vicaire de Chéraute tandis que l'autre était curé d'Orthez, les deux réputés curés réfractaires, et dont on perd la trace en Espagne en 1792. Le premier réapparaitra néanmoins en 1803 au moment du rétablissement du culte, et deviendra le premier curé concordaire à Chéraute puis à Ordiarp. 

C'est un euphémisme que de dire que la Révolution française a bouleversé l'Histoire mais j'aime quand la petite histoire de mes ancêtres rencontre ainsi la grande...

Illustration : "L'accordée du village" de Jean-Baptiste Greuze (1761). Musée du Louvre.
SourcesAD64, Archives de Bordeaux-Métropole (acte de mariage), Mariages33Geneanet.
Sur les curés réfractaires : Gallica.bnf

samedi 16 novembre 2019

Celle qui nous a transmis son nom

Elle était assise sur un banc de pierre, le regard tendu vers la ligne de montagne se détachant derrière le clocher de l'église. A vue de nez, elle devait avoir à peu près mon âge mais paraissait beaucoup plus usée par les années. Cette fois-ci, j'avais décidé de ne pas finasser, de jouer cartes sur table.

"Egun on ! Vous êtes Catherine Eppherre ?
- C'est mon nom. Et vous ?
- Je suis Marie, votre descendante à la huitième génération. Vous savez, je rêvais de vous rencontrer. Car c'est à vous que je dois mon nom. Et qu'elle n'a pas été ma surprise de voir qu'à trois siècles d'écart, il s'orthographiait toujours de la même façon ! 
- Oh, vous savez, moi je n'ai jamais appris à écrire.
- Oui, je sais. Qu'est-ce que ça peut m'agacer de lire dans les actes notariés : la femme autorisée et congédiée par son mari et de le voir signer à votre place ! Mais au bout du compte, c'est vous qui avez gagné.
- Comment ça ?
- Et bien, non seulement vous êtes l'héritière de la maison Eppherre de Barcus mais c'est votre nom à travers elle que vous nous avez transmis alors que nous aurions dû prendre le patronyme de votre mari Jean Saru. 
Ce nom, on le porte fièrement jusqu'à maintenant. Par exemple, mon père, Dominique Eppherre, est l'exact homonyme de votre grand-père et de votre fils aîné. D'ailleurs, c'est une tradition qui a perduré jusqu'au milieu du XXe siècle, tous les aînés se prénomment Dominique. Avez-vous une idée du nombre de Dominique Eppherre dans mon arbre ? Vingt-et-un !
- Comment vous savez tout ça, vous ?
- Je suis généalogiste, enfin ... amateure. Mais j'ai quand même coécrit un livre sur le sujet car la généalogie basque, c'est drôlement compliqué ! Tenez, vous par exemple, vous êtes doublement mon aïeule : je descends à la fois de votre fils aîné Dominique par son cadet Simon Eppherre dit Recalt, et de votre cadet, François Eppherre dit Iriart. Nous savions que le berceau de la famille était à Barcus mais sans vous, nous ne serions pas là ! 
- Vous m'en direz tant !
- Ah, j'ai remarqué autre chose à propos de votre mère Marie Satçoury qui a épousé en secondes noces le frère aîné de votre mari.
- Ne m'en parlez pas, quelle peau de vache, celle-là ! Savez-vous qu'elle nous a traînés chez le notaire Carricondo ? Prétextant qu'elle s'était chargée de l'administration de la maison Eppherre pendant six ans avec son deuxième mari Dominique qui, en effet, est le frère aîné de mon mari Jean, elle a demandé sa part de l'héritage. Nous avons dû mon mari et moi leur verser 225 livres en argent comptant ! Mais bon, j'aime beaucoup ma demi-sœur, Marie Saru, alors je pardonne à notre vénale de mère, que Dieu ait son âme !
- Demi-sœur qui est aussi la nièce de votre mari et qui à son tour deviendra héritière de la maison de Saru et donnera son nom à une autre lignée de Barkostars
- C'est vrai, je n'y avais pas pensé. En somme, c'est nous les femmes qui avons tout fait ici !" conclut Catherine, en partant d'un grand éclat de rire. Sur ce, elle arrange quelques mèches échappées de son burukoa, époussette son tablier, fait claquer ses sabots, se lève et s'en va en me faisant un petit signe de la main.

Je la regarde s'éloigner, cette aïeule qui avait 10 ans à la mort de Louis XIV, n'aura connu que l'Ancien Régime et qui pourtant, à elle seule, illustre un modèle plutôt moderne : la famille matrilinéaire basque...

Ce billet a été réalisé dans le cadre du RDV Ancestral, un projet d'écriture mêlant littérature et généalogie. La règle du jeu est la suivante : je me transporte dans une époque et je rencontre un aïeul. Pour retrouver mes précédents billets sur ce thème, suivre le libellé #RDVAncestral.

Lexique :
Egun on : bonjour (se prononce egoun oun en souletin)
Barkostars : habitants de Barcus (Barkoxe en basque)
Burukoa : petit filet en dentelle blanche recouvrant les chignons de nuque

Sources : AD64 (Minutes notariales)
Illustration : Valentin de Zubiaurre (1879-1963)



dimanche 10 mars 2019

De Geüs à Chascomùs ... et plus

En octobre dernier, j'ai fait partie du "comité d'accueil" d'Alberto, un Argentin de retour au pays sur les traces de ses ancêtres. Alors que nous faisions les présentations, il me fit remarquer qu'il connaissait des Eppherre chez lui, à Tres Arroyos. La ville ne fut fondée qu'en avril 1884 aussi me fallut-il quelques temps avant de comprendre quelle branche s'y était établie.

Il existe sur Geneanet une fonctionnalité très pratique qui permet de savoir où les porteurs de son nom de famille sont installés. J'avais repéré des Epherre à Chascomùs une ville plus ancienne et plus proche de Buenos-Ayres, je décidai de commencer par là. Assez vite, je trouvai l'acte de mariage d'un Jean Eppherre et d'une Caroline Chamoux le 28 février 1857 dans les registres paroissiaux de Nuestra Señora de la Merced de Chascomùs.

Ce Jean-là venait d'une branche cadette des Eppherre de Barcus installée à Geüs d'Oloron que j'appelle les "Béarnais" alors qu'ils doivent se sentir aussi Basques que leurs cousins Souletins voisins. Mais passons, cette branche allait m'occuper pendant un bon bout de temps et je ne m'en doutais pas ...

Première surprise, alors que jusque-là j'avais noté une certaine tendance à l'endogamie chez les candidats à l'émigration, voilà que notre petit basco-béarnais se marie à vingt-cinq ans avec une jeune fille de vingt ans originaire ... de Haute-Savoie. Encore merci à Geneanet car c'est ainsi que j'ai pu connaître la date et le lieu de naissance de Caroline Chamoux à Metz-Tessy (74). L'arbre en ligne notait qu'elle avait émigré en Argentine avec un frère et une sœur sans plus de précisions.

Sauf erreur ou plutôt omission, Juan et Carolina Epherra comme ils se feront désormais appeler, ont eu treize enfants, cinq fils et huit filles entre 1859 et 1885, tous baptisés à Chascomùs sauf les deux derniers, l'une à Ayacucho et l'autre à Juarez. Dans les années 1890, on retrouve d'ailleurs la famille à Coronel Dorrego, une autre "ville nouvelle" de l'état de Buenos-Ayres. 

Chose rare dans une fratrie aussi nombreuse, dix d'entre eux vont parvenir à l'âge adulte et se marier.  A Chascomùs, ils vont fréquenter les Amestoy dont le père Guillermo (Guillaume) est originaire de Iholdy. S'en suivront quatre mariages entre les deux familles. Juan Epherra né en 1862 épousera Maria Vicenta Amestoy tandis que ses sœurs Eusebia, Carolina et Claudina lieront leur destin à trois frères Amestoy,  Graciano, Juan Pedro et Guillermo.    

Et tous ces mariages à partir de 1891 seront célébrés ... à Tres Arroyos ! Dans l'état actuel de mes recherches, toujours en cours, je recense une cinquantaine de petits-enfants tous ou presque baptisés en l'église Nuestra Señora del Carmen de Tres Arroyos dont la moitié sont des Epherra. Les derniers recensés étant des années 1915/1920, ce sont à n'en pas douter les aïeux des connaissances d'Alberto !

Nouvelle que je vais m'empresser de lui rapporter...

Sources : AD64, Gen&O, FamilysSearch, Geneanet. 
Illustrations : La gare de Chascomùs en 1875 (Wikipedia

vendredi 28 décembre 2018

Petit miracle de Noël

Le petit miracle en question s'est produit le 22 décembre juste avant 19 heures, et je l'ai vécu un peu comme un cadeau de Noël avant l'heure. Chaque généalogiste connaît ce qu'on appelle une "épine généalogique", en fait un écueil sur lequel on bute pour faire avancer ses recherches ou corroborer une hypothèse. Quelqu'un m'a dit une fois qu'il en traînait une depuis plus de dix ans ! La mienne avait presque quatre ans et à vrai dire, je ne pensais plus vraiment la résoudre un jour...

Lorsque l'on s'intéresse à la généalogie basque, on sait l'importance de la maison, une composante essentielle pour comprendre la transmission du patrimoine et du nom de nos ancêtres. En mars 2015, aux balbutiements de mes recherches, j'avais raconté dans un billet comment j'avais retrouvé la Maison D'Eperre (sic) à Barcus. Ce n'était pas vraiment une surprise, mon père et la plupart de mes cousins m'ayant appris que le berceau de la famille se trouvait là.  

Au fur et à mesure de l'avancée de mes travaux, j'appris que la branche dont je descends par mon père côté paternel, prenait sa source à Alos où un cadet Epherre (tel qu'il signait son nom) avait épousé l'héritière de la maison d'Iriart. François Epherre dit Iriart (sosa 144) était mon aïeul à la 7e génération. Son acte de décès m'apprenait qu'il était mort le 31 juillet 1811 dans sa maison d'Alos à environ 86 ans, situant sa naissance autour de 1725. Il y était précisé qu'il était de Barcus, fils de Jean Epherre et de Catherine Saru. Erreur funeste !

L'état civil n'existant pas pour Barcus avant 1783 (et encore, avec une interruption entre 1789 et 1793, Révolution oblige !), je me résolus cette année à éplucher les minutes notariales de manière méthodique avec pour pour objectif de relier François, cadet (D')Epherre, à la branche aînée de Barcus que j'avais jusque là étudiée mais isolée de mon arbre. 

Sous l'Ancien Régime, je l'ai déjà raconté ici, on consultait son notaire pour un oui ou pour un non. La plupart des habitants ne parlant que le Basque et ne sachant pas écrire, juste signer leur nom - ce qui dans ce cas s'est avéré très précieux - les notaires étaient pléthores. Certains se rendaient même sur les marchés pour enregistrer un acte, signé à la plume sur un coin de table du cabaretier voisin !  

A Barcus, je vais retrouver de nombreux actes notariés entre 1744 et 1769 mentionnant une Catherine, héritière de la maison (D')Epherre et son mari Jean (De) Saru, maître adventif* de ladite maison. A partir de 1770, c'est leur fils aîné et héritier, Dominique, qui apparaît dans de nombreux actes. J'avais déjà retrouvé son acte de mariage en 1754 avec Marianne Duque de Barcus. Il signe Eppherre, exactement comme mon nom s'écrit aujourd'hui !

A Abense-de-Haut (parfois écrit Abense Supérieur) village de près de 300 habitants en 1793, jumelé depuis à Alos et Sibas, je vais rechercher mon aïeul François dans des milliers de pages entre 1748 et 1762. En vain. A Tardets, gros bourg voisin de la Haute-Soule, je tombe sur le testament d'un François Saru, concierge du Château de Trois-Villes, originaire de Barcus, qui fait un legs en faveur de son neveu et filleul, François D'Eperre dit Iriart d'Alos (sic), le 13 février 1767. Je sens que je brûle.

C'est finalement dans les minutes notariales de Maître Darhan, notaire à la résidence de Tardets, que je vais retrouver le "pacte de mariage" signé entre Jean de Saru dit Eperre et  Dominique Deperre (sic), père et fils, de Barcus, contractant pour leur fils et frère François, fils légitime de Jean de Saru et Catherine Deperre, d'une part ; et d'autre part Dominique Etchart (!) maître adventif* d'Iriart d'Alos, représentant sa fille Marie héritière D'Iriart. Il est signé du 15 janvier 1760.

En conclusion, le résultat de cette quête prouve encore une fois qu'au Pays basque le nom de la maison s'est souvent substitué au nom patronymique quitte à le faire disparaître totalement. Quant à mes proches, s'ils ont bien suivi mes explications, ils aurant noté que nous n'aurions jamais dû nous appeler Eppherre mais ... Saru** ! 

* Maître adventif (ou adventice) : celui qui a épousé l'héritière de la maison.

Sources : AD 64 (Etat civil et minutes notariales), Gen&OGeneanetWikipedia
Illustration : Geneanet
Nota :Mon arbre sur Geneanet n'est pas encore à jour, il faut que je fusionne les deux branches sur Geneatique. Ce sera mon prochain chantier !

mardi 23 janvier 2018

En finir avec Scholastique ?

Ah les vertus de la sérendipité ! Ce petit miracle de la généalogie qui fait tomber par hasard sur des actes longtemps recherchés au moment où l'on ne s'y attend plus. Pour les besoins de mon dernier "rendez-vous ancestral", je consultais récemment les registres des communes réunifiées de Lichans-Sunhar lorsqu'un nom m'interpella : Bernard Sabalgoïty. Et si ...?

Je me mis à parcourir l'acte dans lequel le susnommé déclarait la naissance de son fils François le 4 décembre 1824 dans la maison où il était métayer, né de lui et de son épouse légitime, Marie Epperre (sic). Tout concorde : "ma" Scholastique qui je le sais, se fait désormais appeler Marie, s'est mariée à Barcus le 3 mars 1821 avec un certain Bernard Chabalgoïty, nom que j'avais parfois vu écrit avec un "ç" mais jamais encore avec un "s". 

Les âges correspondent et le père de Scholastique étant lui-même un François, elle a pu vouloir donner son prénom à son fils comme elle avait donné le prénom de sa mère à sa petite Engrâce. En effet, cette pauvre Scholastique n'avait eu qu'un seul enfant, une malheureuse petite fille, née de son premier mariage en 1814 avec Pierre Heguitchoussy à Barcus, et décédée le 17 décembre 1815 à l'âge de trois mois. 

J'avais cherché en vain d'autres enfants du côté de Barcus et avais fini par me résigner. Scholastique dite Marie, déjà âgée de 37 ans lors de son deuxième mariage n'aurait pas de descendance. Le fait qu'elle et son mari Bernard aient été métayers les aura amenés à se déplacer et c'est probablement la raison pour laquelle leur fils François est né à Lichans.

Plus tard, ils finiront leur vie à Etchebar, le village natal de Bernard. L'autre bonne nouvelle c'est que non seulement mon "héroïne" a eu un fils mais elle a eu le temps de connaître ses deux petits-fils, Bernard, né le 12 novembre 1853 à Lacarry où son père, François, était bordier* et Jean, né lui à Abense-de-Haut le 17 novembre 1861.

J'ai retrouvé les livrets militaires des deux frères et l'acte de mariage de l'aîné. Scholastique-Marie a bien eu une descendance au moins jusqu'au 20e siècle. En revanche, une "épine" demeure : je n'ai jamais retrouvé l'acte de décès de son premier mari que j'ai vainement cherché entre décembre 1815, date de la mort de la petite Engrâce et mars 1821 quand Scholastique se remarie. D'ailleurs dans cet acte de mariage, il n'est nulle part précisé qu'elle était veuve... 

Les registres étant très lacunaires durant cette période, il est fort probable que je ne sache jamais ce qu'il est advenu de Pierre Heguitchoussy.
A moins que la sérendipité ...
.
Pour retrouver tous les billets consacrés à Scholastique, suivre le libellé "Scholastique"

* Un bordier était un fermier ou laboureur à bras qui exploitait une borderie (borda en basque) et payait une rente annuelle au propriétaire. Les bordas étaient plus petites que les métairies. (d'après Vieux métiers)  

Illustration : Aquarelle de Petitdidier (Delcampe.net)
Sources : AD64Genealogie64, Registres Militaires 64

jeudi 4 mai 2017

Les passagers de l'entrepont (III)

Cette fois, ça y est, ils sont partis. La traversée durera vingt-deux jours, aussi faut-il s'occuper. Avec les copains, on joue au mus*, on parle du pays, de la famille, pas trop pour ne pas avoir le coeur gros, et de la conscription à laquelle on vient d'échapper. On reluque aussi les filles. Tous n'ont d'yeux que pour la jolie Faustina Barace, 17 ans, qui vient d'Isaba en Navarre espagnole. Mais attention, sa mère, Josefa, veille...

Le meilleur copain de Pierre pendant cette traversée s'appelle Beñat Orgambide, ou Dorgambide, va-t-on savoir avec ces employés d'état civil ! Il est né le 23 février 1871 à La Bastide-Clairence, en Basse-Navarre. Laboureur comme son père Arnaud, il est l'aîné d'une famille de sept enfants. C'est le plus gros de la bande, Pierre le taquine un peu et se moque aussi de son basque bas-navarrais différent de celui qui se parle en Soule. 

Les Souletins, ce sont Jean Behety, né le 8 février 1871 à Barcus dans la maison d'Etienne Behety et de Marianne Eyheralt mais placé comme domestique à Gotein-Libarrenx, Jean Harchinchu, 16 ans et Jean-Pierre Halcepo, 17 ans, tous deux de Sainte-Engrâce, et Dominique Bente de Trois-Villes bien que né à Tardets le 6 mars 1872. Lui aussi est l'aîné de sept enfants, au foyer de Basile Bente et Gracieuse Aguer.

Il y a aussi les Basco-béarnais comme Jean Chanquet d'Esquiule, né le 19 mai 1869, fils de Pierre Chanquet et de Marie Muscagorry. Il a le coeur gros de partir mais c'est un cadet et comme le veut la tradition, c'est à son aîné de trois ans, Joseph, que reviendra la ferme. Pierre et ses copains se sont aussi liés d'amitié avec un Navarrais de 18 ans, Jose Maria Etchenique, originaire d'Etchalar. Un autre petit gars qui les intéresse c'est Bernard Lamardonne, 17 ans, de Lourdes et dont le principal intérêt est qu'il voyage avec sa grande soeur de 22 ans, Claire. 

Trois jeunes filles du pays ont embarqué seules. D'Anne Heguiaphal, 25 ans, on ne sait pas grand chose mais on suppose qu'elle voyage avec Marie Mirande, 22 ans et Magdeleine Ressegue, 21 ans, toutes trois de Barcus. Marie porte le prénom et le nom de sa mère, elle est née le 21 novembre 1866 à Barcus mais l'homme qui l'a déclarée ne lui a pas donné son nom. Quant à Magdeleine, née le 19 janvier 1867 à Barcus chez Bertrand Ressegue et Marie Hoursourigaray, elle part retrouver son frère Dominique, embarqué sur ce même bateau le 5 novembre 1886. 

Bientôt deux ans. Magdeleine espère qu'il sera là à l'arrivée à Buenos Aires... 
[A suivre...]
* Jeu de cartes très populaire au Pays Basque

Sources : AD64, Registres militaires 64, Fonds Vigné, Association Ikerzaleak

lundi 21 décembre 2015

La vie mystérieuse de Scholastique E., enfant naturelle (III)

Patience et persévérance sont les deux mamelles de la généalogie. Parmi les premiers destins auxquels je me suis intéressée, celui de Scholastique Eppherre vient de connaître un nouveau rebondissement !

Dans les deux billets que je lui avais consacrés, les observateurs auront peut-être remarqué un grand absent. A chacun de ses mariages, si Scholastique apparaît comme fille "illégitime" ou "naturelle", mention est bien faite d'un père, un dénommé François, cadet de la maison Eppherre à Barcus. Elle porte du reste son nom et non celui de sa mère, comme son demi-frère Jean Uthurburu, né lui de père inconnu...

Jusque là, je n'avais pas trouvé la trace du père "naturel" de Scholastique mais je ne désespérais pas. J'avais bien remarqué sur de nombreux actes de Tardets la présence comme témoin d'un certain François Eppherre mais rien pour le relier à mon "héroïne". A son sujet, je dois dire que si l'on devait décerner la palme du civisme, il l'emporterait haut la main ! 

Entre 1800 et 1820, il apparaît un nombre incalculable de fois dans les actes de baptême, mariage et décès de sa commune comme témoin. Coutelier de métier, il disparaît pendant de longues périodes (peut-être était-il itinérant ?) mais dès qu'il est là, on a l'impression qu'il passe sa vie à la mairie ! C'est ainsi que j'ai réussi à le retrouver et à reconstituer son histoire.

Né vers 1767 ou 1768 à Barcus, il a eu Scholastique en 1787 à 19 ou 20 ans, Engrace Uthurburu, née quant à elle vers 1764, était donc un peu plus âgée que lui. Pourquoi leur fille est-elle dite enfant naturelle alors qu'elle porte le nom de son père et que celui-ci est nommément mentionné dans ses actes ? Mystère. Au moment de son premier mariage en 1814, elle vit dans la maison de son grand-père paternel à Barcus. Peut-être est-ce lui, le chef de famille, qui l'a reconnue et accueillie ? 

François, entre temps, s'est établi à Tardets où où il s’est marié le 3 Ventôse an V (21 février 1797) à l'age de 30 ans, Il a épousé Marie Agie dite Destein, née en 1768, elle-même fille naturelle d’Arnaud Agie et de Marie Jeanne Destein. Ensemble, ils auront quatre enfants, Dominique, né le 21 décembre 1797, Gracieuse, le 6 juillet 1801, Jean, le 29 septembre 1804 et Philippine, le 15 mai 1806. 

Seules les filles auront une descendance, Jean est mort en bas âge et Dominique... a disparu*. C'est le mari de Philippine, Pierre Ponsol, qui à son tour déclare le décès de son beau-père François, le 30 janvier 1844 à Tardets dans la maison Destein. L'histoire ne dit pas si celui-ci avait revu sa fille aînée avant de mourir...

Scholastique aura eu en tout cas de nombreux demi-frères et demi-sœurs entre Barcus et Tardets, du côté de son père comme de sa mère, un bel exemple de famille recomposée !  

* C'est un des nombreux mystères qui entourent cette famille mais qui sait, peut-être comme son père, réapparaîtra-t-il quelque part ?

Illustration : Mauricio Flores Kaperotxipi

lundi 30 mars 2015

Le destin contrarié de François E., poilu de 1914

Lorsqu'il débarque le 19 juin 1914 à Ellis Island, François Eppherre, 37 ans, marié, natif de Géronce (Basses-Pyrénées), est sans doute loin de s'imaginer que son voyage en Amérique va tourner court. Il a embarqué au Havre à bord du paquebot France, deuxième du nom (sorti en 1912 des chantiers de Penhoët), une semaine auparavant après avoir traversé toute la France.

Une fois accomplies les formalités d'entrée aux États-Unis, il est certainement pressé de mettre cap sur l'Ouest où il se placera comme berger. En tout cas, à Ellis Island, il donne comme contact celui de Jean Mendiondo, un "pays" qui l'a précédé en 1905, lui aussi parti retrouver son frère Pierre à Reno (Nevada). Il faut compter alors cinq jours de train pour rallier New York à la côte Ouest.

L'émigration aux Amériques est un phénomène qui touche de nombreux cadets au Pays basque à partir du 19e siècle (François est le sixième d'une fratrie de dix). De 1832 à 1891, sur les 112 000 habitants que compte le Pays basque français, 80 000 ont émigré, soit une moyenne de 1330 par an ! On sait que François est marié, et peut-être père de famille, mais il a dû faire ce choix justement pour faire vivre les siens...

C'est là que son livret militaire nous réserve une surprise. Rappelé suite à la mobilisation générale du 2 août 1914, il rejoint son régiment à Pau le ... 4 août, soit à peine deux mois après être parti ! Ce soldat que l'armée décrit petit (1,57 m), yeux et cheveux châtain foncé et nez retroussé, est de la classe 1897. Ce qui veut dire qu'il a déjà effectué trois ans de service militaire (son livret précise qu'il est réserviste depuis le 1er novembre 1901). Oui mais voilà, la patrie est en danger et notre François revient au pays dare-dare pour la servir.

La campagne contre l'Allemagne (bel euphémisme !) durera pour lui du 4 août 1914 au 6 février 1919. Le 7, il est démobilisé définitivement et se retire à Géronce, son village natal. Il décèdera le 1er mars 1960 à Billère, près de Pau, à l'âge de 83 ans.

Il aura passé près de huit ans sous les drapeaux, et vu son rêve américain s'envoler ...

vendredi 27 mars 2015

Où les prénoms suivent la tradition ... ou pas

Ramiro Arrue y Valle
Généalogistes sérieux, passez votre chemin, ce billet n'est pas pour vous...
Aujourd'hui, dernier jour d'une semaine bien remplie, notamment passée à retranscrire de nombreux actes de mes lointains cousins de Barcus et de Lanne, j'ai envie de vous parler d'un sujet plus léger : le choix des prénoms.

Très tôt, j'ai su que je devais le mien à une longue tradition familiale. En commençant cette généalogie, je me suis vite aperçue que celle-ci remontait au 18e siècle. Les aînés, du moins "mâles" de la famille Eppherre, s'appellent tous ou presque Dominique depuis 1725. C'est le cas de mon père et d'une bonne  douzaine de ses devanciers. Jean (le prénom de mon oncle) tient la corde. Pour les filles, la gagnante est sans conteste Marie mais ce n'est pas le propre de ma famille. En tournant les pages des AD du 64, j'ai pu constater qu'environ deux filles sur trois le portaient au 19e siècle. En somme, je suis une bonne synthèse...

Néanmoins, j'ai déjà évoqué ici ma rencontre avec une Scholastique dont le prénom m'avait intriguée. Depuis, j'ai trouvé une Euphrosine, dont la sainte patronne est une jeune chrétienne d'Alexandrie au 5e siècle qui choisit Dieu plutôt que le vieux mari imposé par son père (je résume).

Mais la palme des prénoms originaux dans mon arbre revient à ceux donnés par Thérèse Curutchet dite Eppherre (1798-1844) de Barcus. Petite dernière d'une fratrie de dix enfants dont six auront une descendance, elle épouse le 19 novembre 1822 un Jean Etchandy de Barcus du même âge qu'elle. Sur leur acte de mariage, il est dit marchand de laine. Les affaires ont dû être florissantes car sur les actes de naissance de leurs enfants, très vite il sont mentionnés comme rentiers...

Ensemble, ils auront sept enfants dont les prénoms dénotent une certaine originalité comparés à ceux de leurs nombreux cousins. Jugez-en plutôt : Bathilde (1823), Jean Marcel (1824), François Ildephonse (1826), Marie Julie (1827), Marianne Adélaïde (1829), Philippine (1831) et enfin Jean-Baptiste (1835).   

Et vous, votre "top list" des prénoms les plus surprenants ? 

mardi 17 mars 2015

Nous vieillirons ensemble ...


Pour mettre un point final à l'histoire de Scholastique, mon "héroïne" des deux précédents billets, je vais évoquer ici un phénomène que j'ai remarqué à travers la généalogie mais aussi au présent : les vieux couples se suivent souvent de manière très rapprochée dans la mort.

Ainsi de Scholastique Eppherre. Je venais de transcrire son acte de décès le 30 janvier 1870 à l'âge de 83 ans quand en tournant une page, je m'aperçus que son mari Bernard Chabalgoity en mourant le 30 octobre 1869 à l'âge respectable de 92 ans, l'avait précédée de ... trois mois jour pour jour ! Malgré une différence d'âge de neuf ans, ils auront vécu 48 ans ensemble. Sans descendance, sauf surprise.
 
Quelques jours auparavant, j'avais constaté la même chose avec le couple formé par Engrace Eppherre et Jean Curutchet dit Eppherre, nés respectivement vers 1753 à Barcus et 1746 à Saint-Just. Ensemble, ils auront huit filles et deux garçons et une quarantaine de petits-enfants en 52 ans de mariage. Pour être exacte, je n'ai pas trouvé leur acte de mariage mais leur fille aînée Marie Philippine héritière d'Eppherre (déjà évoquée ) étant née en 1781, je suppose qu'on peut dater leur union à 1780. Eux aussi sont décédés l'un après l'autre. Engrace est partie la première, le 27 septembre 1833 à 80 ans et Jean, deux mois après, le 30 novembre, à l'âge de 87 ans. 

Ne dit-on pas "unis jusqu'à ce que la mort vous sépare ?"  

Illustration : Mauricio Flores Kaperotxipi    

lundi 16 mars 2015

La vie mystérieuse de Scholastique E., enfant naturelle (II)

Antonio Alba Burguillos
En généalogie, il faut toujours se méfier des hypothèses hasardeuses. Ainsi, mon précédent billet se concluait sur le postulat que le second mariage de Scholastique avait été arrangé. Elle, la fille naturelle de François cadet d'Eppherre de Barcus, aurait épousé le frère plus âgé d'un neveu par alliance...

Aujourd'hui j'ai découvert qu'il n'en était rien. En effet, Bernard Chabalgoity (ou Çabalgoiti selon les différentes orthographes rencontrées) est né le 22 avril 1777 (j'ai trouvé son acte de baptême) à Etchebar, un petit village de montagne connu pour ses stèles mortuaires discoïdales typiques du Pays basque. De son côté, Arnaud Chabalgoity, né vers 1784, était lui natif d'Esquiule, village limitrophe de Barcus. Ma conclusion était donc aussi hâtive que fausse !

En revanche, à force de persévérance (la généalogie apprend à la fois l'humilité et la patience ...), j'ai  trouvé l'acte de décès de ma Scholastique devenue au fil des années Marie (un prénom un peu dur à porter peut-être ?)

Elle est morte à l'âge de 83 ans, à Etchebar, où elle avait dû assez logiquement suivre son second époux, dans la maison de Sallaber où elle était locataire selon l'acte (voir ci-dessous). J'ignore ce qu'a été sa longue vie, j'ai eu beau éplucher les archives de Barcus et d'Etchebar, je ne lui ai trouvé aucun autre enfant né après la petite Engrace, décédée prématurément...

En revanche, elle a eu deux demi-sœurs car sa mère, la belle fileuse de Barcus, Engrace, a eu de son mariage avec le sieur Jean Moléon (de huit ans son cadet !) au moins deux filles, Élisabeth et Pauline.


A suivre ...

samedi 14 mars 2015

La vie mystérieuse de Scholastique E., enfant naturelle

Valentin de Zubiaurre
J'aurais pu intituler ce billet "Ce que je sais de Scholastique Eppherre". Mais alors il aurait fallu que je le complète d'un "Tout ce que je ne sais pas à propos de Scholastique Eppherre..." Déjà le prénom interpelle, jamais rencontré ni avant ni depuis. Un prénom original, rare même pour l'époque, et qui fait référence à une sainte italienne du VIe siècle, sœur jumelle de Saint Benoît.

Commençons par le début. La première fois que j'ai rencontré notre Scholastique, lointaine cousine du côté de Barcus, c'était sur son acte de mariage avec Pierre Heguitchoussy le 17 février 1814. Elle a environ 27 ans, elle est tisserante (sic) et vit dans la maison Eppherre. Là où ça devient intéressant c'est qu'elle y est déclarée comme fille illégitime de François cadet d'Eppherre et d'Engrace Uthurburu, journalière. Le 1er octobre 1815, le jeune couple (enfin lui était âgé de 41 ans !) a une fille, prénommée Engrâce comme sa grand-mère, qui décèdera le 18 décembre 1815 à l'âge deux mois (lire l'article sur la mortalité infantile ). Je n'ai pas trouvé d'autre enfant après elle.

Curieusement, je retrouve la trace de Scholastique dans un second acte de mariage en date du 3 mars 1821. Elle épouse un certain Bernard Chabalgoity, cultivateur de Barcus, âgé de 43 ans. Elle est dite "enfant naturelle" de François Eppherre. Premier mystère : je n'ai pas à ce jour retrouvé l'acte de décès de son premier mari. Comme je doute qu'elle ait été bigame ou divorcée, c'est étrange. Deuxième mystère : je n'ai trouvé non plus aucune descendance avec ce second époux ni l'acte de décès de l'un ou de l'autre. Je continue à chercher et espère pouvoir apporter un jour une suite à cette histoire...

Néanmoins, j'ai fait quelques découvertes sur la famille de Scholastique. J'ai trouvé l'acte de décès de sa mère Engrace, à l'âge de 78 ans, le 9 février 1832. Elle y est dite mariée à un certain Jean Moléon. Plus surprenant, j'ai également trouvé l'acte de mariage daté du 29 janvier 1821 d'un autre fils d'Engrace, Jean, âgé de 26 ans, né de père inconnu ! 

En résumé, Engrace Uthurburu, fileuse de son état selon son acte de décès, a eu deux enfants hors mariage, Scholastique à 23 ans et Jean à 30 ans, avant de se marier avec Monsieur Moléon. Autre anecdote, dans la maison Eppherre une "nièce" de Scholastique, Marie Anne Curutchet dite Eppherre s'est mariée avec Arnaud Chabalgoïty qui m'a tout l'air d'être un frère du deuxième mari de sa "tante"...

De là à en conclure que le mariage a été arrangé entre une fille "illégitime", jeune veuve, et travaillant probablement pour la famille (elle était tisserande, sa mère fileuse, et les Eppherre marchands de laine) avec un parent par alliance plus tout jeune, il n'y a a qu'un pas ...   

mercredi 11 mars 2015

Vie et mort d'un soldat de la guerre de 1870

Émile Betsellère
Le sujet de ce billet risque encore de "plomber l'ambiance" après celui sur la mortalité infantile mais difficile de s'intéresser à ses ancêtres du 19e siècle sans tomber sur un acte comme celui qui suit. On y apprend que Dominique Eppherre, âgé de 21 ans, est décédé des suites d'une méningite à l'hôpital d'Avignon.

J'ignore où était cantonné le 76e régiment d'infanterie de ligne auquel appartenait ce soldat au nom si familier, au moment de la guerre franco-prussienne de 1870. Peut-être mon jeune aïeul y faisait-il ses classes avant d'être envoyé au front ? C'est vrai qu'on aurait aimé en savoir plus sur les circonstances de sa mort, et si, ce que l'acte de décès ne précise pas, son corps fut rendu à sa famille ou enterré en Avignon.

Nous nous contenterons donc de ce document officiel signé par l’administration de l'hôpital, contresigné par les autorités militaires et visé par le maire de la commune de Barcus. Pour lui rendre un peu de son humanité, je préciserai que ce jeune conscrit était le troisième né d’une fratrie de neuf enfants dans la maison Larrascaburu de Barcus, fils d'Engrace Loge et de Jean Eppherre dit Larrascaburu, laboureur. Il avait quatre sœurs et quatre frères.

Voilà ce qu'écrit Marie-France Chauvirey (in La vie au Pays Basque au temps de Napoléon III et d'Eugénie, Editions Cairn) à propos du Basque et de son rapport à l'armée : "L'uniforme français (ou espagnol) n'a nul prestige à ses yeux ; il ne répugne ni au hasard, ni au danger ni au combat mais la discipline militaire le terrifie [...].

Les Basses-Pyrénées arrivent alors en tête de l'insoumission nationale, avec deux cinquièmes, un tiers et parfois la moitié des insoumis de France. [...]. Et de préciser que le Ministre de la Guerre ordonna de refuser leur passeport aux garçons dans leur dix-neuvième année pour leur éviter de fuir à l'étranger et d'émigrer ...   

lundi 9 mars 2015

Quand la mortalité infantile frappait ici comme ailleurs


Marie Philipine Curutchet, héritière Eppherre de Barcus et son mari Arnaud Behety, cadet de Garindein, ont eu ensemble - sauf omission - huit enfants entre 1809 et 1825. Parmi eux, seuls trois atteindront l'âge adulte. Marie, née en 1811 est décédée en 1813 à l'âge de deux ans et demi, trois mois après sa petite sœur Marianne qui elle n'aura vécu qu'un peu plus de deux mois. Jean-Baptiste, mort en 1825, n'atteindra jamais ses sept ans. 

Quant à l'année suivante, 1826, elle fut également meurtrière puisqu'en moins de deux semaines de février, disparurent la petite Thérèse de cinq ans et la dernière née de la famille, également prénommée Marianne âgée de quatorze mois. 

Cette situation n'a rien d'exceptionnel dans la France de la première moitié du 19e siècle. Selon les calculs du Docteur Bertillon, à l'origine d'une classification des causes de décès en France publiée en 1893, le taux de mortalité infantile dans les années 1860 est de 22%. Plus d'un enfant sur cinq. Avant un an, les maladies infectieuses comme le croup font des ravages et emportent plusieurs enfants d'une même fratrie. A cela s'ajoutent les accidents domestiques...

Enfin, dans les campagnes et c'est particulièrement le cas au Pays basque, les superstitions font que l'on se fie d'abord au rebouteux, voire aux prières à un saint, avant de faire appel au médecin qui arrive souvent trop tard au chevet de l'enfant.. 
Selon les calculs du docteur Bertillon, le taux de mortalité infantile en France dans les années 1860 est de 22 % - See more at: http://www.histoire-image.org/site/etude_comp/etude_comp_detail.php?i=109#sthash.p7ScSlDJ.dpuf
Selon les calculs du docteur Bertillon, le taux de mortalité infantile en France dans les années 1860 est de 22 %. - See more at: http://www.histoire-image.org/site/etude_comp/etude_comp_detail.php?i=109#sthash.p7ScSlDJ.dpuf
Selon les calculs du docteur Bertillon, le taux de mortalité infantile en France dans les années 1860 est de 22 %. - See more at: http://www.histoire-image.org/site/etude_comp/etude_comp_detail.php?i=109#sthash.p7ScSlDJ.dpuf

IllustrationChristian Krohg-Sovende

vendredi 6 mars 2015

Où le premier voisin joue un rôle primordial


Une autre découverte que j'ai faite quand j'ai commencé à fouiller dans les actes numérisés des archives départementales des Pyrénées Atlantiques, c'est que lors d'une naissance ou d'un décès, ce n'étaient pas les membres de la famille qui en faisaient la déclaration mais les plus proches voisins.

Il m'est arrivé au début de m'agacer de ce que l'on mentionne leur âge dont je n'avais que faire alors que je n'avais même pas celui de la mère lorsqu'il s'agissait d'un nouveau né (quand elle était seulement mentionnée !).

Depuis, je vois mieux l’intérêt d'en savoir un peu plus sur les voisins de mes ancêtres (dis-moi qui tu hantes, je te dirais qui tu es ...) lorsque mention est faite de leur profession par exemple. Ainsi, alors qu'à Aussurucq ou Alçay, on trouve surtout des laboureurs ou agriculteurs, à Barcus, plus gros bourg, il est question de menuisiers, armuriers ou autres cabaretiers.

J'ignore si dans d'autres régions de France ce phénomène se retrouve mais voilà ce qu'écrit Marie-France Chauvirey (in La vie d'autrefois en Pays Basque - Ed. Sud Ouest) : "Le premier voisin n'habite pas toujours le plus près ni même très près. L'usage veut que sa maison soit entre la vôtre et celle de l'église [...]

C'est lui, averti avant tout autre que la mort vient de frapper, qui accourt avec sa famille pour prendre en charge les tâches domestiques et rurales afin que la famille ne soit pas distraite de son chagrin et de ses prières, ainsi que pour présider au rituel des funérailles. Protecteur et garant dans les événements importants (fiançailles, mariage, ouverture de testament), le premier voisin ne saurait, fût-il fâché à mort, faillir à son rôle." 

Illustration : Mauricio Flores Kaperotxipi

mardi 3 mars 2015

Où l'on découvre où se cachait la maison Eppherre

A un moment donné, tout généalogiste amateur se retrouve dans une impasse. C'était mon cas en début de semaine. Pour varier les sources de recherches, je suis allée faire un tour du côté des registres de recrutement. Une mine de renseignements ce site, à se demander comment vont faire les généalogistes des générations futures vu qu'on a supprimé le service militaire...

Bref, j'ai retrouvé la trace d'une petite vingtaine d'Eppherre, la plupart d'Aussurucq et d'Alçay, déjà connus, quelques-uns du Béarn (branches non encore explorées) et un certain Pierre Eppherre né en 1860 à Barcus. Comme un chien qui trouve un os à ronger, me voilà donc repartie dans les archives départementales à fouiller cette fois les registres de Barcus pour reconstituer la lignée de ce malheureux (pour la petite histoire, il a été arrêté le 18 novembre 1885 par le tribunal correctionnel pour délit de vol puis recherché par l'armée pour insoumission...). 

Et là, bingo ! (eh oui la généalogie peut donner des montées d'adrénaline !), je découvre enfin la maison Eppherre que je recherchais depuis mes débuts de cette passion dévorante. Mille excuses à mes ancêtres que j'ai précédemment traités de "coucous", l'etxondoa Eppherre a bien existé mais à Barcus. Quand j'ai fait part de cette trouvaille à mon père, avec son humour flegmatique basque (si, si, ça existe...) il m'a répondu : "Oui, ça ne me surprend pas. Alçay, Barcus et Aussurucq pour notre branche, sont les noms qui revenaient dans la famille. Tu m'aurais dit que tu l'avais retrouvée dans le Tarn, tu m'aurais surpris".  

En l'état actuel de mes recherches, le plus ancien propriétaire de la maison Eppherre de Barcus est un Dominique (tiens, tiens...) né autour de 1726*. Son héritière, Engrace, (ca 1753-1833) a vécu jusqu'à 80 ans. J'aurais l'occasion de revenir sur sa descendance dans laquelle j'ai découvert mes premières jumelles... Son frère cadet Jean (ca 1765-1826) est le grand-père du conscrit Pierre qui m'aura permis de retrouver notre maison souche. Grâces lui en soient rendues !

* Il apparaît comme témoin dans un acte de décès d'un voisin le 26 Fructidor an II (12 septembre 1794) où il est précisé qu"il est âgé de 67 ans.  PS : J'ai retrouvé entre temps son acte de décès, il est mort en 1816 à l'âge de 90 ans !

Illustration : Mauricio Flores Kaperotxipi